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vendredi 6 septembre 2013

Au revoir Groenland ; retour en Islande.

Nous voici à Reykjavik, en Islande, après une belle traversée de 3 jours depuis Sermiligaaq, petit village de la côte est du Groenland. Grand beau temps, splendides aurores boréales, ciel étoilé, vent faible (5 à 15 nds), houle (bien agitée les premières 24h) ont agrémenté cette navigation. La température de l’eau passe de 2° à 9°, notre dernièr iceberg nous salut à 80 milles (150 km) des côtes groenlandaises, des baleines nous font un signe timide de leur jet et de leur queue, les globicéphales et les fulmars nous accompagnent dans le détroit du Danemark (ou mer du Groenland) et nous retrouvons les gros chalutiers islandais et féroïens pêchant dans les grands fonds.
Côte Groenlandaise

 
Dernier iceberg

Aurore boréale




La dernière semaine au Groenland est marquée par deux grosses tempêtes qui nous immobilisent dans des mouillages. Bloqués dans un petit mouillage dans le fjord Johan Petersen, ceinturé de rochers et à l’abri du Nêrernat-tivaq (634m), un vent froid de nord-ouest descendant directement de l’Inlandsis* nous retient pendant 24h, les yeux rivés sur notre anémomètre (vent à plus de 45 nœuds) et notre sondeur. Le mouillage est de bonne tenue.

*L’inlandsis, calotte glaciaire qui recouvre les neuf dixièmes du Groenland, domine les fjords de plus de 1000 mètres, et s’écoule lentement en d’immenses glaciers qui alimentent eux-mêmes les fjords en glaces dérivantes et en eau douce.

 
Au petit matin, sous un éclairage magnifique et sur une eau gelée nous mettons le cap sur le petit village de Tiniteqilaaq en traversant le Sermilik peuplé d’icebergs. Il fait froid !






 
Très vite le temps change de nouveau et c’est au mouillage (70m de chaîne dans 10m d’eau, artimon à 2 ris pour stabiliser le bateau) dans le fjord d’Ikatek, en face de l’ancienne base américaine, que nous laissons passer la deuxième tempête, ce dimanche 1er septembre. Pluie, neige au-dessus de 400m, vent fort et clapot secouant notre voilier animent cette journée d’attente.

 
La prudence du langage des groenlandais est en phase avec la nature qui les entoure. Leurs phrases commencent très souvent par « upa ou imaqa » : « peut-être », « imera » : « il peut se faire que cela soit », « takisawarput » : « nous verrons ».

Notre mode de pensée d’Europe occidentale fonctionne tout simplement avec des « parce que », « because », … Au Groenland, face à une situation exigeant une décision claire ou une explication, alors c’est un autre mot qui s’impose toujours : « imaqa »,… peut-être. L’expression de la nature environnante explique-t-elle de cette prudence ?

Notre dernière journée au Groenland nous offre le spectacle magnifique des chutes de pans de glaces de 30 mètres de haut alors que nous longeons le front du glacier Rasmussen.



C’est toujours avec la même émotion que je quitte cette région du Groenland que j’ai fait mienne pendant 40 jours. Cette dernière semaine est automnale avec ses nuits de 6 heures, le pont gelé au petit matin, les linaigrettes s’étiolant, la neige saupoudrant les montagnes, ses éclairages particuliers, son temps changeant très rapidement, les lumières des petits villages ressemblant à celles de nos crèches provençales, … Tout semble éphémère comme les aurores boréales dans le ciel, les glaciers qui relâchent des morceaux de glaces énormes qui dérivent, changent de forme et de couleurs au grès de leur voyage et disparaissent, la glace de mer qui immobilise le paysage au lever du jour, …

C’est un pays où « Dame Nature » est magique !

Alors que nous progressions dans la glace face à l’Inlandsis un équipier s’exprimait : « encore un peu plus et nous sommes au milieu de nulle part ! »

Mouillage de Sangmileq



Tasiilâq

Tasiilâq


Tiniteqilâq

Mouillage d'Ikateq

Glacier Karale


Glacier Karale


Sermiligâq
 
Quant à la population de cette côte, les descendants des eskimos racontés par Paul-Emile Victor, son évolution anime nos discussions quotidiennes dans le carré. Il n’y a plus d’eskimo ! L’époque ou un phoque apportait à la famille du chasseur nourriture, lumière, chaleur et vêtements, ou d’une seule action réussie tout le reste découlait, est belle et bien révolue.

La colonisation Danoise, malgré les aspects positifs que nous pouvons observer (éducation, soins, habitat, …) a cependant apporté le moteur du monde occidental, celui de créer des besoins et  faire payer pour leurs satisfactions et ses aspects négatifs (alcoolisme, assistanat, consommation, perte de d’identité, …) Les eskimos avaient-ils envie de cela et que restera-t-il de leur propre culture?

 
Appareillage pour la France lundi 9 septembre. Une partie de l’équipage débarque à Reykjavik ce jour et c’est à 6 que nous continuons notre navigation vers la Bretagne. Nous avons 3 jours pour faire l’approvisionnement en vivres frais, les révisions habituelles du moteur (vidanges, changement des filtres), lessives et contrôle du gréement, sans oublier les moments de détente dans les bains chauds des piscines de Reykjavik.
Nous étudions de près les fichiers météo et construisons des scénarios de routes. Escale ou pas aux îles Vestmann, passage par l’Ecosse ou l’Irlande, route directe, … ?
Arrivée à Arzal prévue le 27 septembre.